Le juge des référés du tribunal administratif de Lille refuse d’ordonner la création à Calais d’un centre d’accueil d’urgence pour les migrants mais il ordonne des mesures pour leur venir en aide.
Le 21 juin 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a été saisi d’une demande présentée, notamment, par plusieurs associations présentes à Calais pour venir en aide aux migrants qui s’y trouvent. Elles ont demandé au tribunal, à titre principal, d’ordonner au préfet du Pas-de-Calais, au département du Pas-de-Calais et à la commune de Calais de prendre les mesures nécessaires pour mettre en place, sur le territoire de la commune, un centre d’accueil d’urgence pour les migrants ou, à titre subsidiaire, l’organisation d’un accès à l’eau, à des sanitaires, à des douches et à des distributions de repas.
Le juge des référés a rejeté la demande tendant à ce qu’un centre d’accueil d’urgence pour les migrants soit créé à Calais. D’une part, il n’est pas démontré que cela constituerait la seule solution pour prendre en charge efficacement et dignement les personnes concernées, alors que les pouvoirs publics ont fait le choix, après le démantèlement du camp dit de la Linière, d’orienter les migrants arrivant à Calais vers les dispositifs de droit commun, notamment le dispositif national d’asile, ailleurs sur le territoire français. D’autre part, il ne s’agit pas d’une mesure qui peut être prise utilement à très bref délai, de sorte qu’elle ne relève pas des pouvoirs du juge des référés. Celui-ci, qui agit dans le cadre fixé par l’article L. 521-2 du code de justice administrative, est en effet le juge de l’urgence et il ne peut en principe ordonner que des mesures provisoires.
En revanche, le juge des référés a considéré qu’il était nécessaire qu’un certain nombre de mesures soient prises, a minima, pour éviter que les personnes concernées soient exposées à des risques de traitements inhumains et dégradants. Il a relevé, en premier lieu, qu’en raison de la difficulté à les amener dans les dispositifs de droit commun d’asile ou d’hébergement d’urgence, entre 400 et 600 personnes se trouvent aujourd’hui à Calais, dans des conditions extrêmement précaires, comme en attestent les associations requérantes mais aussi le Défenseur des droits dans un communiqué du 14 juin 2017 et Médecins sans frontières, à la suite d’une visite effectuée au mois de juin. Il a également relevé, en deuxième lieu, que l’effet « attractif » de Calais s’explique principalement par sa situation géographique, à proximité de l’Angleterre, et que s’il n’était pas totalement exclu que l’existence d’une aide humanitaire ait pu contribuer à ce phénomène, la « sédentarisation » des migrants s’explique essentiellement par le renforcement des mesures de sécurité du tunnel et de la zone portuaire qui rendent les passages de l’autre côté de la Manche plus difficiles. Enfin, le juge des référés a considéré qu’il n’était en tout état de cause pas possible de laisser sans aide aucune des personnes en état de dénuement total, à défaut de pouvoir les faire entrer dans les dispositifs d’aide auxquels ils peuvent légalement prétendre, en espérant qu’elles finissent par se lasser et par partir d’elles-mêmes ailleurs.
Dans ces conditions, le juge des référés a ordonné les mesures suivantes :
- renforcement des maraudes, à destination des mineurs, afin de procéder à un recensement et d’améliorer l’efficacité du dispositif de mise à l’abri déjà mis en œuvre par le département du Pas-de-Calais, en lien avec France Terre d’Asile ;
- création, selon des modalités qui restent à déterminer entre l’ensemble des acteurs concernés, de plusieurs points d’eau et de sanitaires, et renforcement du dispositif d’accès à des douches, réservé jusqu’à présent aux personnes malades et en particulier à celles atteintes de la gale ;
- obligation de laisser les associations continuer à distribuer des repas dans les conditions déjà fixées par le juge des référés (ordonnance du 22 mars 2017) ;
- organisation de départs vers les centres d’accueil et d’orientation (CAO), pour une mise à l’abri d’urgence.
Ces mesures doivent commencer à être exécutées dans un délai de dix jours.