Par deux jugements du 8 février 2024, le tribunal condamne l'État à verser à la communauté urbaine de Dunkerque (CUD) la somme totale de 33 816 680 euros en réparation du préjudice résultant des erreurs commises par l’Etat dans le calcul des montants de compensation de taxe professionnelle qui lui ont été versées entre 2011 à 2020.
La taxe professionnelle a été supprimée à compter de 2010. Pour compenser les effets de cette suppression sur le budget des communes et des intercommunalités, l’Etat a institué un mécanisme de compensation qui a fonctionné en deux temps. D’abord, au titre de l’année 2010, il a versé une « compensation relais » égale au produit de la taxe professionnelle perçu pour l’année 2009. Puis, à compter de l’année 2011, les communes et les structures intercommunales ont bénéficié d’une « dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle », dont le montant dépend notamment de celui de la compensation relais de l’année 2010.
La CUD avait contesté, dès 2012, le calcul de la « compensation relais » qui lui avait été versée en 2010 en estimant que l’administration fiscale avait sous-évalué la base de la taxe professionnelle correspondant à deux grandes entreprises établies sur son territoire. Sa position a été définitivement confirmée par plusieurs décisions du Conseil d’Etat en date du 15 octobre 2020, qui a jugé que cette erreur de calcul, qui avait conduit la CUD à obtenir une « compensation relais » inférieure à celle qu’elle devait recevoir, constituait une faute de l’Etat à son égard. Le Conseil d’Etat a également condamné l’Etat à verser à la CUD le solde de la somme que celle-ci aurait normalement dû percevoir au titre de 2010.
A la suite de ces décisions, la CUD a saisi le tribunal pour obtenir le paiement des sommes dont elle estime avoir été privée à l’occasion du versement de la dotation de compensation dont elle a bénéficié entre 2011 et 2020. En effet, cette dotation a été elle-même calculée sur la base, sous-évaluée, de la compensation « relais » de 2010.
Le tribunal fait droit à cette demande, en jugeant notamment que, contrairement à ce qu’affirmait l’administration fiscale, les demandes de la CUD n’étaient pas prescrites, car le délai de prescription a été interrompu par les différents recours devant la juridiction administrative qui se sont conclus, en dernier lieu, par les décisions du Conseil d’Etat de 2020. Il condamne donc l’Etat à verser le manque à gagner résultant de cette erreur de calcul pour la période allant de 2011 à 2020, soit une somme totale de 33 816 680 euros.